C'est
de
ce
côté-ci
de
l'occident
que
l'orage
éclata,
dans
les
premiers
jours
de
la
principauté
de
Léon.
L'avènement
au
pouvoir
d'un
sultan,
au
centre
de
l'Asie-Mineure,
qui
avait
eu
lieu
en
même
temps
que
l'avènement
au
pouvoir
des
Roupéniens,
avait
enlevé
aux
Grecs
leurs
plus
belles
provinces
dans
cette
partie
de
l'Asie-Mineure.
Quelque
temps
après
les
Turkmens
ou
Turcomans,
à
l'instigation
de
ces
derniers,
vinrent
à
deux
ou
trois
reprises
se
jeter
sur
le
vaillant
Thoros
II.
Mais
les
Grecs
ne
furent
point
satisfaits:
les
attaques
des
Turcomans
furent
sans
succès,
et
il
leur
fallut
même
avoir
recours
aux
ruses
et
aux
trahisons
pour
se
tirer
de
là.
Le
plus
fort
gage
de
paix
et
d'armistice
entre
ces
deux
peuples
voisins,
les
Turcs
Iconiens
et
les
Arméniens
Roupéniens,
c'étaient
les
remparts
du
Taurus.
Impraticables
pour
ces
deux
peuples,
ces
monts
n'étaient
pourtant
pas
infranchissables.
Notre
géographie
du
Pays
a
fait
voir
ailleurs
que
les
monts
du
sud
de
l'Asie-Mineure
ne
forment
pas,
comme
ceux
du
Caucase,
un
chaîne
constante
de
montagnes
pleines
et
contiguës,
mais
qu'ils
sont
coupés
par
intervalles
et
qu'ils
donnent
ainsi
des
passages
étroits,
et
pénibles,
il
est
vrai,
mais
que
l'on
pourrait
suivre
au
besoin.
C'est
par
ces
cols
et
quelquefois
par
les
sommets
de
ces
montagnes
que
les
deux
Etats
ennemis
se
ruèrent
sur
le
territoire
l'un
de
l'autre.
Cette
fois,
ce
fut
un
certain
Rosdom
ou
Rustème,
chef
des
Turcomans,
qui,
croyant
les
Arméniens,
déconcertés
par
la
mort
de
Roupin
et
tout
occupés
de
l'élection
de
son
successeur,
comptant
en
même
temps
sur
les
grandes
victoires
du
plus
acharné
des
ennemis
des
Chrétiens,
Salaheddin,
qui
leur
infligeait
des
défaites
terribles
dans
la
Syrie
et
dans
la
Palestine,
pensa
pouvoir
à
jamais
réduire
à
son
joug
les
Arméniens.
Il
entra
donc
dans
le
pays
des
Roupéniens
avec
une
grande
armée,
et
selon
l'expression
de
l'historien
—
innombrable,
s'avança
rapidement
jusqu'à
Sis,
la
ville
princière,
et
campa
dans
la
plaine
de
Ravine.
On
crut
voir
alors
en
ce
Rosdom
une
espèce
d'aventurier;
d'autres
le
prirent
pour
l'un
des
généraux
des
fils
du
Sultan
d'Iconie,
car
personne
ne
pouvait
lever
une
si
grande
multitude
d'hommes
sur
le
territoire
de
ce
redouté
Sultan,
ni
franchir
ses
frontières
sans
ses
ordres.
Quoique
indisciplinées,
les
hordes
de
Rosdom
étaient
redoutables
et
leur
invasion
fut
si
rapide
qu'elle
ne
permit
pas
à
Léon,
au
pouvoir
depuis
peu,
de
lever
les
troupes
qu'exigeait
la
circonstance.
Une
rapidité
plus
extraordinaire
que
la
leur,
un
courage
héroïque
inouï
pouvaient
seuls
repousser
les
bandes
ennemis.
Le
vaillant
et
rusé
baron
d'Arménie,
à
l'exemple
de
ses
ancêtres
éloignés,
des
Vahan
Mamigonian,
jugea
plus
sûr
de
s'opposer
à
l'ennemi
avec
une
poignée
d'hommes
braves
et
dévoués
qu'avec
une
nombreuse
levée
de
guerriers.
Il
se
précipita
sur
les
Turcomans
à
l'improviste
et
avec
trente
hommes
seulement,
dans
un
endroit
où
Rosdom
se
croyait
en
toute
sûreté,
il
traversa
le
camp
ennemi
avec
la
rapidité
de
la
foudre,
arriva
jusqu'à
la
tente
de
Rosdom
et
le
tua
sur-le-champ.
Comme
il
l'avait
prévu,
son
action
d'audace
bouleversa
toute
cette
multitude
d'hommes
indisciplinés
qui
se
mirent
à
fuir.
Léon
les
poursuivit,
en
tuant
un
grand
nombre
jusqu'auprès
d'un
fort
situé
sur
les
rochers
de
Saravane,
au
bord
du
Tchahan,
qui,
paraît-il,
—
servait
de
frontière
entre
son
territoire
et
celui
du
prince
d'Antioche.
Ce
fait
fut
trouvé
tellement
extraordinaire
et
tellement
au-dessus
de
la
force
humaine
qu'une
légende
raconte
que
l'on
crut
voir
alors,
à
droite
et
à
gauche
de
Léon,
S.
t
Georges
et
S.
t
Théodore,
descendus
des
hauteurs
de
Sis
dans
les
rangs
roupéniens
sous
la
forme
de
guerriers.
Il
y
avait,
sans
aucun
doute,
deux
églises
ou
chapelles
dans
cette
célèbre
forteresse
de
Sis.
Si,
maintenant,
l'on
veut
avoir
une
idée
de
la
ferveur
de
nos
intrépides
aïeux
envers
ces
deux
grands
saints,
on
n'a
qu'à
regarder
le
témoignage
qu'en
donne
le
précieux
cachet
de
plomb
de
notre
Thoros
I,
petit-fils
du
grand
Roupin,
qui
fit
graver,
sur
l'un
des
côtés
de
ce
cachet,
les
images
de
ces
deux
Saints
et,
sur
l'autre,
l'inscription
en
grec:
Théodore
Sébaste
Roupénien
sous
la
protection
des
deux
puissants
martyrs.
Vahram,
l'historien,
ne
fait
mention
que
d'un
seul
de
ces
saints
qui
serait
venu
en
aide
à
Léon
dans
ce
combat.
Il
dit:
«Car
Rosdom
fut
tué
Du
trait
de
S.
t
Georges».
Si
l'on
trouve
que
c'est
une
naïveté
de
dire
que
Léon
gagna
cette
bataille
parce
qu'il
eut
l'aide
de
S.
t
Georges
et
de
S.
t
Théodore,
on
doit
être
bien
plus
étonné
qu'il
ait
pu,
tout
seul,
obtenir
un
succès
si
prodigieux.
Cette
victoire
de
Léon
produisit
un
émerveillement
général
et
lui
acquit
l'admiration
et
l'attachement
de
tous
ses
compatriotes.
Il
serait
certainement
à
propos
de
parler
ici
des
origines
et
de
la
personne
de
ce
Rosdom,
mais
j'avoue
que
je
ne
les
connais
pas,
de
même
que
je
ne
sais
rien
sur
les
circonstances
qui
l'ont
amené
à
envahir
la
principauté
de
Léon,
non
plus
que
ce
qui
s'est
passé
pendant
son
invasion.
Le
fait,
cependant,
est
bien
authentique
et,
si
les
Ecrivains
musulmans
n'en
parlent
pas,
c'est
pour
ne
pas
avoir
à
rappeler
une
de
leurs
plus
terribles
défaites.
Nos
historiens,
contemporains
de
cette
invasion
de
Rosdom
et
de
ce
haut
fait
d'armes
des
Roupéniens,
sont
unanimes
à
en
rendre
témoignage,
quoiqu'ils
diffèrent
quelque
peu
dans
leur
récits,
dont
le
plus
fidèle,
croyons-nous,
est
celui
du
plus
haut
personnage
de
ce
temps,
le
Catholicos
Grégoire
Degha.
Dans
son
élégie
sur
Jérusalem,
ce
dernier
nous
raconte
tout
le
fait,
sans
cependant
nommer
les
chefs
ennemis
et
il
nous
dit
que
cela
eut
lieu
après
la
prise
de
la
Ville
Sainte
et
à
la
suite
des
invasions
dans
la
principauté
d'Antioche.
Il
ajoute
que
Léon
se
battit
encore
une
seconde
fois
avec
les
Turcomans,
qu'il
les
défit
et
les
mit
complètement
en
déroute
vers
les
frontières
de
Germanica
ou
Marache.
L'historien
Ghiragos,
nous
le
dit
encore
plus
explicitement,
bien
que,
tout
ce
qu'il
nous
rapporte,
il
ne
le
sache
que
par
ce
qu'il
l'a
entendu
raconter,
et
qu'il
modifie
généralement
l'histoire
des
faits.
Il
croit
que
ces
deux
invasions
ont
été
effectuées
par
les
armées
de
sultan
d'Alep
et
de
Damas.
Mais
il
se
trompe
cette
fois.
En
1187-90,
la
puissance
des
Athabegs,
princes
de
ces
villes
d'Alep
et
de
Damas
était
anéantie
et
l'autorité
des
fils
du
fameux
Noureddin
avait
aussi
vu
venir
sa
fin.
Presque
toute
la
Syrie
et
la
Mésopotamie
étaient
tombées
dans
les
mains
du
fameux
Salaheddin
que
nous
avons
vu
occupé
à
la
prise
des
possessions
latines
de
la
Palestine
et
de
la
Syrie.
Quand
Salaheddin
sentit
qu'il
n'avait
plus
à
redouter
les
attaques
et
la
vengeance
de
Frédéric,
empereur
d'Allemagne,
il
résolut
de
se
jeter
sur
Léon
et
de
l'écraser.
A
l'époque
où
nous
en
sommes,
les
Turcomans
de
l'ouest
et
ceux
du
nord
qui
vivaient
en
nomades
près
des
possessions
de
Germanica
forcèrent
Léon
à
leur
faire
la
guerre.
Il
les
mit
en
déroute,
pendant
qu'ils
se
trouvaient
dans
les
jours
de
jeûne
qui
précèdent
leur
grande
fête,
ainsi
que
le
rapporte
le
Catholicos
historien:
«Ils
allaient
célébrer
la
fête
Du
jour
de
leur
Pâque…
»
C'est-à-dire
du
Ramazan,
et
Léon
s'en
retourna
à
Sis
chargé
d'un
innombrable
butin
et
emmenant
de
nombreux
prisonniers.