Léon le Magnifique premier Roi de Sissouan ou de l'Arménocilicie

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  L'on a vu qu'un an avant de mourir, Léon, par un dernier édit et par un bref du Pape, avait désigné sa fille Zabèle, pour l'héritière de son trône et lui avait choisi pour époux André, l'un des fils du Roi de Hongrie. Les ambassadeurs qui avaient été chargés d'amener le prince, s'en revinrent, aprés le décès de Léon, rapportant la nouvelle que le roi de Hongrie était revenu sur sa decision, j'en ignore la cause, et ne consentait plus à ce que son jeune fils vînt en Arménie. Cette nouvelle, on doit le penser, amena le trouble parmi les baillis 1 et les barons. Des querelles s'en suivirent. Bientôt se présentèrent des soi-disant prétendants au trône et à la succession de Léon. C'est alors que fut commis à Sis, l' assassinat du Sire Adan par les Hachiches ( Assassins). Il fut frappé dans la rue qui menait à l'église de Barsouma. Quelques-uns prétendent que ce meurtre fut accompli à l'instigation du connétable Constantin le Bailli, second tuteur de Zabèle, mais ils n'en donnent aucune preuve. Supposent-ils que Constantin agit en cela pour se venger de sa captivité chez Keïkaouse ? Effectivement, lors du combat de Choghagan, Sire Adan ne l'avait pas aidé, il s'était même conduit de façon qu'il ne pût remporter la victoire, aussi Constantin par la faute d'Adan avait été cerné par l'ennemi. Nous voulons en douter parce que les preuves nous manquent.

Constantin était le fils de l'oncle maternel de Léon, et avait été élevé dans la même maison que lui, quand Rita, la mère de Léon et de Roupin, faisait leur éducation chez son frère Pagouran. Ce dernier était le frère de Vassagh et celui-ci le père de Constantin. Constantin était cependant bien plus jeune que Léon. On dit qu'il habitait en 1205 au palais de celui-ci. Quelques années après, il avait été nommé Généralissime de l'armée. Bien que l'on assure que le fils aîné de Constantin, Sempad le Connétable, soit en 1206 ou 1208, Constantin vécut encore plus de quarante cinq ans après Léon et fut dit vieux comme Abraham. On peut donc en conclure qu'il avait plus de trente ans lorsque mourut Léon, et qu'il avait été à son service pendant plus de quinze ans, se montrant plein de courage, de finesse et de dévouement au Roi. C'est à cause de ses qualités que Léon en fit le chef de l'armée et qu'il lui confia, en autre, la charge de bailli de sa fille. Cette charge, il la remplit tout seul par la suite, et fut l'unique intendant du palais après la mort de son collègue Sire Adan.

Le premier qui se présenta comme prétendant au trône d'Arménie, fut le vieux mais actif gendre de Léon, Jean de Brienne, roi de Jérusalem. Il croyait, comme nous l'avons dit plus haut, que son jeune fils avait droit à ce trône. Ce dernier était le petit-fils de Léon; il était de Rita Stéphanie, fille de notre grand roi, et de sa première femme et, par conséquent, plus âgée que Zabèle. Jean croyait si fondée sa prétention, qu'il en référa au pape Honoré III, et en reçut une réponse d'assentiment, écrite au commencement du mois de Février 1220. Nous avons dit comment il fut trompé dans son espérance par la mort de la femme et de son fils. Quelques-uns des historiens de l'Occident prétendent que Jean de Brienne se serait rendu en Sissouan avant la mort de sa femme et de son fils et qu'il en aurait été chassé par les Arméniens, puis, que dans sa colère, il aurait voulu se venger par les armes de ce qu'on venait lui faire. A cette époque, les Arméniens paraissent avoir écrit une lettre au Pape, lui annonçant la dernière volonté de Léon, car Honoré adressa une seconde lettre à Jean de Brienne, au mois d'Août, lui défendant, sous peine d'excommunication, de s'ingérer dans les affaires des Arméniens. Jean de Brienne perdit toute espérance.

Le second prétendant fut le jeune prince bien connu, Roupin-Raymond, qui avait été réellement désigné naguère comme le successeur de Léon et dont le Pape avait confirmé les droits au trône d'Arménie, mais son ingratitude envers Léon, nous l'avons dit, lui avait retiré ses droits, et l'avait éloigné du trône comme il avait autrefois éloigné Léon d'Antioche. Bohémond, son terrible rival, l'avait à son tour chassé d'Antioche, et tandis qu'il cherchait à y rentrer avec l'aide du Pape, il apprit que Léon venait de mourir. Par un autre acte d'imprudence, puisqu'il connaissait le dernier testament du roi, il voulut usurper le trône qu'il avait perdu. Ce n'était pas une vaine ambition qui le poussait à faire cela, c'était le vice des princes de cette époque d'aspirer toujours aux dignités élevées, surtout quand l'un d'eux s'imaginait avoir quelque droit à une succession à cause de ses liens de parenté avec celui qui la laissait. Ainsi, nous les voyons tous rivaliser de manèges pour contracter des mariages avec les filles ou les princesses veuves de seigneurs de châteaux-forts sans prendre souvent en considération leur âge ou les autres convenances. Aussi, Geoffroy, le seigneur de Sarouantikar, dans l'espoir secret de monter sur le trône, osa demander en mariage la reine Sibile, femme de Léon; elle n'avait que vingt et un an alors. Mais Constantin qui avait prévu les raisons de Geoffroy écarta sa demande.

Le plus audacieux de tous les préténdants fut le maréchal d'Arménie Vahram, fils de Godefroy, seigneur de Coricos, qui demanda à Roupin d'épouser sa mère, qui avait alors quarante ans, et lui avait promis son appui pour s'emparer du trône. Mais Roupin avait eu recours au légat du pape, pendant que ce dernier se trouvait au siège de Damiette, il l'avait prié de le déclarer premier successeur de Léon au trône de Sissouan. Pélage qui ne savait pas les dernières volontés de Léon, se rendit à sa prière et écrivit aux Arméniens de l'accepter.

Non content de cela, Roupin, réunit quelques vagabonds et en forma une légion. Ces vagabonds étant en armes dans le Sissouan, Roupin appela à lui son partisan Vahram et tous deux gagnèrent les Grecs qui formaient la majeure partie des habitants de Tarse, et s'emparèrent de cette ville et de son château. Ensuite, ayant rassemblé cinq mille hommes, ils pensèrent pouvoir fondre à l'improviste sur la capitale et s'emparer du trône. On vint informer de leur projet, Constantin le Bailli, qui ne s'attendait à rien et qui, ne sachant pas le nombre de ces insurgés, sortit de la ville à la tête de trois cents hommes. Il alla directement à Mamestie, croyant les y trouver, mais ne les ayant pas rencontrés, il se retira et se dirigea sur Adana, lorsque soudain il se vit entouré par une innombrable bande d'hommes. Les soldats de Constantin, en voyant leur grand nombre, n'osèrent pas les attaquer, mais Constantin qui était plein d'ardeur et qui était poussé par sa vive affection pour Léon, ranima leur courage, et, se préparant à l'attaque dans un endroit propice, situé près du Petit-pont, se jeta sur les insurgés, les dispersa, leur fit des prisonniers qu'il ordonna de dépouiller de leurs armes et de leurs vêtements, ne leur laissant que la vie sauve, pendant qu'il allait poursuivre les barons qui s'enfuyaient. Ceux-ci se hâtèrent de rentrer à Tarse, dont ils fermèrent les portes, et continuèrent de guerroyer avec les soldats de Constantin en leur lançant des flèches du haut des remparts de la ville.

Constantin avait pour conseiller et pour aide le Catholicos Jean; cependant le siège traînait en longueur et la prise de la ville aurait été difficile à effectuer, si un certain Vassil ne se fut entendu avec le Connétable. Comme celui-ci lui promit une récompense, il lui ouvrit les portes de Tarse. Aussitôt les soldats de Constantin s'y ruèrent et firent aux habitants de la ville ce qu'ils avaient fait aux prisonniers, ils les dépouillèreut de tout ce qu'ils avaient sur eux et leur épargnèrent la vie. Mais Vahram et Roupin et les autres princes qui avaient épousé leur cause, allèrent se réfugier «dans le château qui était fort beau et imprenable», comme le dit l'historien. Pour s'en rendre maître, le bailli dut s'armer de persévérance et agir de ruse. Il se saisit un à un des princes qui s'étaient pactisés, les fit sortir du château et jeter en prison, jusqu'à ce qu'il eût pris ce château. Alors il rendit la liberté à quelques-uns d'entre eux et en châtia d'autres selon qu'ils le méritaient, parmi lesquels Vahram qu'il fit mettre à mort pour s'être révolté. D'autres périrent en prison.

Le jeune Roupin subit le même sort. Ce fut réellement un prince malheureux, lui, qui avait compté s'asseoir un jour sur le trône d'Antioche et sur celui d'Arménie, termina sa carrière dans un cachot en 1222. Son étoile qui avait brillé tout d'abord d'un si doux éclat, recevait sa lueur du soleil de Léon, elle promettait de devenir plus brillante quand l'infortuné alla finir ses jours misérablement à l'âge de vingt-cinq ans à peine. Ballottée longtemps par la destinée, sa jeunesse vint se flétrir avec toute sa beauté et ses cheveux qui semblaient des fils d'or 2. Cependant on le plaignit après sa mort comme on l'avait plaint durant toute sa vie. Comme, dès sa plus tendre enfance, il avait été reconnu par le Pape et la cour de Rome d'après les diverses lettres de Léon et celles des autres, le légat du Pape, Pélage, qui se trouvait en Syrie, reçut l'ordre de prendre soin de la femme de Roupin et de leurs jeunes enfants, deux petites filles, dont l'une s'appelait Echiva et mourut toute jeune, et l'autre, Marie, qui se maria, en 1241, avec Philippe de Montfort Seigneur de Tyr et fut appelée Princesse de Toron, (forteresse située près de Tyr qui porte actuellement le nom de Tébnine), titre qu'elle prit ou du nom du lieu ou par le droit de sa grand'mère Alice, fille de Roupin II et mère de Roupin-Raymond 3. Je crois en avoir dit assez pour compléter l'histoire de ce petit-fils du frère de Léon qui prit une part si large dans la vie de ce Roi. J'ai raconté comment il est mort et j'ai parlé de ceux de sa famille qui lui survécurent. Nous reviendrons maintenant à l' héritière du trône d'Arménie, à Zabèle, qui venait d'échapper à un grand péril par la mort d'un des prétendants à sa couronne et par la défaite des insurgés due au puissant bras de Constantin le Bailli. L'on a vu aussi que le conseiller de celui-ci était le Catholicos Jean, qui avait pris une part active aux actes de Léon, avant même que ce dernier régnât. Jean mourut un an et quelques mois après Léon. Ce prince-patriarche avait occupé à deux reprises le siège pontifical en tout dix-huit ans. Il fut inhumé à Trazargue.

On s'agita encore pour élire son successeur, et Léon n'existait plus. Ce fut avec son assentiment, que les quatre derniers Catholicos avaient occupé le siège. On comptait maintenant deux prétendants. Le prince Constantin de Lambroun fils de Héthoum-Élie, habile en tout, favorisait Grégoire de Skévra. Ce Grégoire, comme nous l'avons dit, était un homme vertueux, prudent et savant, il était d'un âge mûr. De son côté, Constantin le Bailli, favorisait celui qui portait le même nom que lui. Constantin de Partzerperte, qui n'avait jamais paru jusqu'alors dans l'histoire. Il paraît qu'il était évêque du canton et du château de Partzerperte, dont le seigneur était le Bailli lui-même. Ce fut cet évêque qui fut élu Catholicos des Arméniens par le vote des évêques et des Vartabieds réunis dans un Concile. Il occupa le siège pontifical pendant quarante-six ans, presque le même espace de temps que Héthoum fut sur le trône royal.

Sceau du Patriarche Constantin I. 4

1 Les Assises de Jérusalem ordonnent d'instituer deux baillis pour tuteurs des jeunes princes héritiers du trône, l'un pour les élever et les protéger, l'autre pour gérer leurs biens. Léon avait suivi cette règle.

2 Les Annales de la Terre-Sainte relatent la capture de Roupin en 1221 et ensuite sa mort de cette façon: «Le bail d'Ermenie prist Roupin à Torso et le mit en prison dont il morut».

3 Isabelle, femme de Roupin frère de Léon, avait hérité du fort de Toron, par son frère franc Humfroy III ou IV, qui n'avait pas laissé de fils. Plus tard Salaheddin s'empara de ce lieu. Quarante ans après, en 1229, lorsque les Chrétiens le reprirent, au moyen de traités, des mains des Égyptiens et que les Teutons voulurent s'en emparer comme l'ayant reçu en cadeau de Humfroy II, Alice, qui avait perdu ses enfants et qui non-seulement avait le sang mais possédait l'ardeur des Roupéniens, s'y opposa et revendiqua ce fort comme faisant partie de son héritage maternel. La Haute-Cour de Jérusalem appuya ses droits, mais le bailli de Fréderic II, qui représentait le roi de Jérusalem, soutint les chevaliers. Alors la princesse Alice, considérant cela comme une injustice commise à son égard par son suzerain 1'Empereur, puisque les lois des Assises lui donnaient raison, poussa les barons vassaux à la révolte et les excita à ne point payer le tribut à l'empereur. Frédéric donna droit à la princesse et lui rendit Toron qui valait 60, 000 besants d'or et paya, comme indemnité, aux Teutons une rente égale à celle du lieu. Alice, la dernière descendante en ligue directe du chef de la maison des Roupéniens, de Roupin le Grand, est citée plus tard encore, lorsqu'elle avait 50 ans et qu'elle donnait par actes autentiques différentes propriétés aux Chevaliers, actes que son neveu et son gendre reconnurent et contresignèrent de nouveau après. La dernière donation d'Alice est celle qu'elle fit, au mois de Novembre 1231, aux Frères de S. Lazare de Jérusalem, en leur instituant une rente de 30 besants d'or que Humfroy I, leur avait légués auparavant, depuis l'année 1151. Après la mort d'Alice, sa petite fille Marie, fille de Roupin-Raymond, hérita de Toron, et Philippe, son époux, en hérita au nom de sa femme. Il passa ensuite à ses fils qui se nommèrent Seigneurs de Toron. Marie eut de Philippe deux fils et deux filles; l'aîné fut Jean de Toron, le cadet Humfroy. Tous deux moururent la même année, en 1283, après avoir vendu leurs domaines. On ne sait pas la date de la mort de Philippine, sœur d'Alice et femme de l'empereur Lascaris.

4 Ce sceau semble appartenir à Constantin I, et fut trouvé lors du creusement de l'église de Séez en France.