Physiographie de L'Arménie

Հեղինակ

Բաժին

Թեմա

I.

 

Le développement des études historiques qu'exige de nos jours l'étendue des faits et des questions politiques, présuppose des connaissances géographiques et géologiques. Peu attrayantes par elles-mêmes, celles-ci amènent souvent les vues les plus élevées et les plus morales

L'aspect général du pays dont je vais traiter, nous présente des phénomènes fort remarquables, et, pour tout dire en un mot, c'est un pays de contrastes par excellence, que toutes les données de sa configuration nous permettent de constater, et qui n'exercent pas sur le moral de ses habitants une médiocre influence. Douée, grâce à sa position géographique, d'un climat des plus tempérés, des plus doux, égale sous ce rapport à l'Italie, à la Grèce, à l'Espagne, l'Arménie présente les horreurs des régions glaciales et parfois les chaleurs des tropiques. Il va sans dire que le contraste de cette position avec l'élévation de sa surface au-dessus du niveau de la mer, en est la cause. En effet, si les plus hautes cimes des Vosges et du Jura n'arrivent point à la hauteur même de  ces plateaux bien peuplés et bien cultivés l'Euphrate, l'Araxe, le Cour et l'Aradzani (Mourad-tchaï) prennent leurs sources argentines; si les fameux passages du Mont-Cenis, du Simplon, du Saint-Gothard sont encore au-dessous des eaux azurées du lac de Sévan entouré de centaines de villages, constamment habités; d'un autre côté, certaines parties extrêmes de notre pays non seulement s'abaissent jusqu'au niveau de la mer, mais sont même dépassées par elle; car les bords de la Caspienne, se confond le plan oriental de l'Arménie, sont à près de 25 mètres au-dessous du niveau de l'Océan

De ces contrastes et ces jeux mutuels de deux saisons opposeés, dont l'une fait, dit on, quelquefois fondre sous ses rayons caniculaires le plomb des coupoles de Diarbekir, tandis que l'autre étend, six mois de l'année, son blanc linceul sur la plus grande partie de la surface du pays, et voit la température s'abaisser au-dessous de 26° Réaum. Les caravanes se munissent dans cette saison d'épaisses fourrures pour traverser les lacs et les fleuves engourdis sous des couches de neige et de glace, qui ne permettent pas de distinguer le vallon de la plaine. Heureux encore si ces hardis voyageurs peuvent échapper  aux avalanches et aux tourbillons de neige qui souvent engloutissent la caravane entière! Le dernier espoir de salut, était, en pareil cas, selon le témoignage du vieux Strabon, une longue perche, que le malheureux enseveli dans les neiges tâchait de pousser à travers la vôute de sa prison glaciale, comme un signal de sa vie palpitante, qui attendait un sauveur. C'est ainsi qu'on sauva notre roi Sanadroug encore au berçeau, après qu'il fût resté trois jours attaché au sein de sa nourrice, dans ce monde de neige. Son petit-fils, Diran, plus malheureux que lui, y perdit la vie après vingt ans de règne. C'était une tâche utile et une fonction honorable que l'intendance royale des Neiges, d'où tirait probablement son nom une de nos plus nobles familles ou races, Ձիւնական. Pour la sûreté des voyageurs, on établissait des hôtels ou caravanséraïs sur les chemins et passages les plus fréquentés et le plus dangereux: tels sont, entre autres, les khans du vallon de Rahva, entre Bidlis et Khelath

Cet hiver arménien, comme le nomme le grand Chrysostome, qui en éprouva les rigueurs, fut souvent l'effroi des conquérants; il est proverbial chez les historiens et les poètes de l'antiquité, de Xénophon jusqu'aux  chronographes byzantins. De nos jours, des voyageurs naturalistes ont constaté que l'hiver d'Erzeroum n'est pas moins rigoureux que celui du Grand S. Bernard, malgré une latitude de 5 degrés de moins et une hauteur absolue de 500 mètres au-dessous du célèbre hospice des Alpes; et que l'hiver d'Agori, sous 39 degrés de latitude, et à la hauteur de 1760 mètres, égale celui du Cap-Nord sous la zone glaciale, à l'extrémité de l'Europe: à Erivan, capitale de l'Arménie-Russe, on a observé l'été, à l'ombre, une température de 30° R. au-dessus de zéro, et l'hiver de 30° au-dessous: alternative qu'on trouverait à peine sous la zone polaire en Groënland, et qu'on ne voit nulle part

Le contraste est plus frappant encore quand on considère l'aspect triste et monotone de notre pays, à l'époque de l'année, , derrière les montagnes qui le séparent du Pont, les orangers fleurissent en plein air. Trébizonde est saluée déjà par l'hirondelle qui, en y venant, plane sur l'Arménie sans y toucher; tandis que à Mossul, au pied d'autres montagnes moins élevées, on vend la glace pour tempérer les chaleurs étouffantes. Cependant entre la capitale du Pont et celle de l'Assyrie, l'étendue de l'Arménie en droite ligne, n'excède pas 6-700 kilomètres; de sorte que la vapeur pourrait la franchir entre l'aube et la nuit d'une longue journée: matinée de printemps, midi d'hiver, soirée d'été. Probablement vous ne profiterez pas, Messieurs, de ce train de plaisir; vous ne voudrez pas, dans une seule journée, vivre trois saisons différentes, surtout la deuxième. Quelle horreur, direz-vous, quel affreux pays que ce pays d'Arménie! Vous en voulez donc à mon pauvre pays? Ah! quand la patrie est bien-aimée, toutes les saisons sont belles, et la nature la plus sauvage s'adoucit dans un cœur cultivé! Toutefois, je connais de vos compatriotes, des habitants de Paris et de Londres, des négociants, des consuls qui ne quitteraient pas facilement le séjour d'Erzeroum pour revenir en Europe, bien qu'ils voient l'eau gelée la nuit même du solstice du Cancer

Ces quatre ou cinq mois délicieux, placés entre deux hivers, ils les préfèrent à toute une année dans votre climat, et dans plus d'un autre. L'élasticité, la pureté de l'air, et la fraicheur de son courant, la limpidité des eaux, la vigueur, l'éclat de la végétation, la saveur des produits de cette terre aérienne, pour ainsi dire, ont fait de l'Arménie un pays  de délices, un quartier d'été pour les conquérants d'Asie et les rois voisins, depuis Sémiramis, jusqu'aux gouverneurs de la Transcaucasie. Le château de Van, bâti sur un pic ou rocher isolé, à plusieurs centaines de pieds au-dessus du plateau qui lui-même s'élève de plus de 5100 pieds au-dessus du niveau de la mer, cette merveille de la nature et de l'art, a été le premier chateau de plaisance d'été de cette reine orgueilleuse, dont il porte encore le nom, nom perdu dans les ruines de Babylone et d'Ecbatane. Ainsi nos rois, n'avaient pas le besoin de chercher leurs quartiers d'hiver chez l'étranger

L'immense plaine ou le steppe de Moughan, que traversent l'Araxe et la Cour avant et après leur jonction, a été de tout temps, par un autre contraste, le refuge d'hiver pour le règne animal de notre pays. L'été, c'est un désert aride qui, sous une herbe brulée ne produit que des serpents perfides, dont l'armée de Pompée a beaucoup plus souffert que de tous ses ennemis en Asie; il devient un pâturage et un véritable haras entre l'été et l'hiver. Dans cette dernière saison, à peine effleuré par une neige transparente, Moughan se peuple de ces charmants épicuriens ailés, dont les migrations annuelles charment le laboureur et le philosophe. Une race, toute autre que celle de ces oiseaux paisibles, s'emparant au moyen âge de ces vastes solitudes, les couvrit de hordes belliqueuses sorties des steppes au-delà du Djihoun et du Jaxarde: les armées innombrables des Mongols, guidées par Djourmaghoun et Houlaghou, y dressaient durant l'hiver leurs chevaux et leurs troupes au carnage et au pillage, qu'elles exerçaient au printemps dans tous les pays d'alentour. Leurs chefs sanguinaires, à l'approche des chaleurs, se sauvaient sur les fraiches hauteurs d'Aladagh, montagne de la chaine de l'Ararat, sur laquelle Abagha-Khan se batit un somptueux château, vaste comme une cité, dont les restes ont échappé à l'investigation des voyageurs, comme sa position est restée inconnue aux célèbres orientalistes qui traitèrent de l'histoire des Mongols

Cette longue chaine de l'Ararat, que je viens de nommer, partage toute l'Arménie, et verse ses eaux, d'un côté, dans les mers Euxi nienne et Caspienne, de l'autre dans la Méditerranée et dans le golfe Persique. Soudée elle-même à l'immense zone de montagnes qui d'un bout à l'autre entoure toute l'Asie, des extrémités des Indes et de la Chine jusqu'à celles de l'Asie Mineure, et se prolonge même dans l'Europe orientale, cette chaine arménienne, avec ses contreforts, est regardée par le plus grand géologue des temps modernes, Humboldt, comme le centre de gravité de tout l'ancien monde; elle est en effet située à distances égales du Cap-de Bonne-Espérance et du détroit de Behring, des bords sablonneux du Sahara et de ceux de Gobi, des vagues de l'Atlantique et du Pacifique. Cependant, cette chaine, pas plus qu'aucune autre dans l'Arménie, ne dessine clairement ni ce rempart impénétrable du Caucase, ni ces crêtes continues des Andes, de l'Himalaya et des Apennins; elle n'a pas même l'aspect imposant du Taurus dans l'Asie Mineure méridionale

L'Arménie est traversée par plus d'un chainon secondaire des branches du Caucase, du Taurus et de l'Ararat; elle est coupée par des blocs de montagnes, hérissée de pics isolés, bien autrement imposants par leurs formes, par leur hauteur et leur volume: et c'est à bon droit que le père de la géographie comparée, Ritter, nomme notre pays, Ile-à-montagnes (Berg-insel). Vous n'en jugerez pas autrement, si vous l'observez entre les plaines de la Mésopotamie, de l'Albanie et de la Géorgie, entre la mer Noire et la mer Caspienne, le plateau s'élève à plus de 2000 mètres, avec des montagnes d'une hauteur absolue de 5000 mètres. Son point culminant, le Massis ou Grand-Ararat (5156 m. ), dépasse de près de 500 mètres le Mont-Blanc; et, isolé de trois côtés, il s'élève comme le géant des montagnes à plus de 4000 mètres au-dessus de la plaine de l'Araxe; montrant glorieusement à une distance de 50 lieues sa tête chenue, autrefois couronnée, selon la tradition pieuse, par le berceau de l'humanité, l'arche de Noé. Par cet isolement et cette hauteur relative il semble plus imposant et plus majestueux que les sommités mêmes des Cordilières et de l'Himalaya. La cape blanche qui le couvre perpétuellement fait un contraste frappant avec ses flancs noirs, quand ils se dégagent du manteau de l'hiver. Car c'est encore un phénomène des plus remarquables de notre pays, que la hauteur de la ligne de glace de ses montagnes; aucune d'elles cependant, excepté le Massis, ne la conserve toute l'année, si ce n'est sur quelques cols peu nombreux. Ainsi, cette ligne ne descend pas au-dessous de 4000 mètres dans les cônes de l'Arménie, et de 3500 dans ses chainons. Il avait donc raison le poète latin [1] de remarquer que pas même dans les monts de l'Arménie la glace inerte ne restait pendant toute l'année

Nec Armeniis in oris

... Stat glacies iners

Menses per omnes.

Qu'il est donc grand le contraste de l'aspect de notre pays entre les mois des deux extrémités de l'année et ceux du milieu; entre ce linceul blanc qui le couvre littéralement tout entier, et le tapis de verdure variée qui y succède subitement! Mais comment disparaissent ces énormes amas de neige et de glace? vont se décharger ces monceaux des eaux naguère enchainées? Elles devraient sans doute ravager, inonder, anéantir toute la surface du pays, si la nature en le formant ne l'avait pour ainsi dire bombé et placé comme un bouclier convexe entre quatre mers méditerranées, vers les quelles ses versants inclinés déversent abondamment ces filtrations limpides, nourricières des plus grands fleuves de l'Asie antérieure

Outre le penchant prononcé du terrain, les lits de ses fleuves sont très-profonds; il y  en a qui présentent des bords escarpés de plusieurs centaines de pieds au-dessus de leurs ondes noirâtres; et c'est pourquoi plusieurs de ces fleuves ou rivières se nomment Noirs. Tout ce déluge annuel ne suffirait pas pour alimenter la terre, si la patiente industrie du cultivateur n'avait creusé une multitude de canaux, et formé un réseau mouvant autour de ses champs et de ses prairies. Il faut le reconnaitre, nos pères, sans avoir les ressources de notre époque, étaient assez avancés dans l'art hydraulique. L'eau stagnante dans le creux du vallon, ou se frayant un passage à travers le roc des ravins, non seulement était attirée pour concourir avec la sueur du laboureur, mais elle était poussée quelquefois par des sentiers serpentants le long des rochers escarpés et des collines à pie, pour se recueillir, à leur sommet, dans un bassin taillé dans le roc du château-fort d'un seigneur ou d'un vassal opprimé par un tyran. Ailleurs, par un autre procédé et avec d'autres vues, on creusait des passages sous le lit profond des fleuves: Ani, par exemple, dernière capitale de l'Arménie, avait son tunnel 900 ans avant Londres. A la vue de ces travaux hydrauliques, on conçoit que de tels ouvriers étaient capables de dompter ces courants d'eau par des arcades de pierre, c'est-à-dire des ponts; et il y en avait assez pour qu'un de nos bardes du moyen-âge voulat jurer par ces ponts de pierre. Cependant ce n'était pas sans peine que l'architecte parvenait à relier les deux rivages des fleuves rapides et torrentiels, témoin la fameuse expression de Virgile

Pontem indignatus Araxes.

Vainement Alexandre et Auguste avaient cherché à dompter ce fleuve. Un autre empereur se crut plus heureux en y jetant un pont, au moins momentanément; et un autre poète courtisan [2] de chanter bien vite

Patiens Latii jam pontis Araxes.

Mais le fleuve patriotique, s'indignant de nouveau contre ces constructions impériales, les foula sous ses ondes, tandis qu'il se joue doucement sous le grand pont à sept arches dont un påtre modeste jeta les fondements. Le Pont-du-pâtre (Tchoban-Këoprussu) est proverbial en Arménie et dans les contrées voisines. Laissant les autres, j'en citerai un seul dans le district proprement dit des Vallons ( Ձորափոր ), d'une seule arche de pierre, qu'une reine, à la fleur de la jeunesse et déjà veuve, construisit en souvenir de son royal époux, le malheureux Abas Bagratide oriental, sur un ravin profond, comme symbole de l'union de deux vies et de deux mondes en perspective. Elle y inscrivit en relief, au pied d'une croix, la devise de son amour et de sa foi ardente. Nul patriote ne pourrait traverser ce pont inspiré, si j'ose le dire, sans jeter un coup d'ail mélancolique et sur les ondes rapides qui toujours abandonnent leur fond et toujours le couvrent, et sur cette inscription protégée par le signe de l'espérance chrétienne, et sur ces deux monastères voisins, Haghpade et Sanahine, vrais Saint-Denis et Saint-Paul de l'Arménie du moyen age, reposent plus de 40 têtes couronnées, avec celle de la pieuse Nana, la reine dont je parlais! Heureusement le temps, moins dévastateur que l'homme, nous a conservé intact, après 700 ans, ce monument à la fois civil et sacré!... Mais serait-ce une sirène enchanteresse, cachée aux fonds de ces eaux bouillonnantes, qui m'a entrainé si loin de mon sujet? Ah! Messieurs, quoi de plus fort, de plus attrayant, de plus saint que l'harmonie de la nature avec la religion et  les souvenirs de la patrie: souvenirs si doux, même dans leurs douleurs! 

Avant de dire adieu à l'hydrographie de l'Arménie, vous avez remarqué sans doute qu'en raison de l'inclinaison du terrain, de la hauteur des montagnes, de l'abondance des torrents et de l'espace proportionellement restreint de leurs cours, elle devrait avoir des cataractes, des cascades: les noms mêmes de nos fleuves, Araxe, Tigre, Djorokh, en indiquent la rapidité. Le premier est fameux par ses chutes grandioses, vers la partie inférieure de son cours, qui est aussi la partie la plus méridionale du vaste empire russe, dont les immenses fleuves mêmes ne présentent pas un spectacle plus magnifique et en même temps plus horrible; car pour frayer un passage à travers ces gouffres et ces énormes quartiers de roche, il a fallu qu'un terrible tremblement de terre renversât toute une montagne Grande, et laissât notre fleuve national se précipiter comme un coursier écumant, affranchi de tout frein. En voyant la lutte opiniâtre de ces blocs avec ce tourbillon d'eau de l'Araxe, le grand Chah Abas disait à ses suivants: Voilà comment on résiste à l'ennemi: - Oui, Sire, quand on à de si forts soutiens, lui répondit-on

en lui montrant les parois rocailleux qui encaissent en cet endroit la cataracte

L'Euphrate, patriarche des fleuves bibliques, qui prend sa source à la hauteur de 9000 pieds au mont des Fleurs, à Garine (Érzeroum), n'a pas moins de 300 rapides dans l'espace d'une douzaine de lieues, entre la Grande et la Petite Arménie. Son affluent oriental, l'Aradzani, près du célèbre pélerinage de S. Jean Baptiste à Mouch, se précipite tout entier par une large cataracte, qui, du bruit de ses chutes, se nomme Gourgour. Enfin le Djorokh, fleuve arméno-pontien d'un cours moins long, et plus rapide que les autres, en traversant un lac prend la forme d'une vraie cascade, qui, selon le témoignage d'un naturaliste Allemand, (qui avait parcouru trois parties de la terre et observé ses merveilles), ne saurait être surpassée en beauté grandiose par aucune autre, si ce n'est par la cataracte du Niagara. Voudriez vous maintenant essayer une navigation sur un tel fleuve? Eh bien! prenez une barque à Artwine, ville limitrophe de Lazistan; vous descendrez le fleuve jusqu'à ses embouchures, à Bathoum, en 6 ou 7 heures; voulez vous regagner Artwine, vous remonterez le fleuve en 6 ou 7 jours : vous voyez que la  pente de son lit n'est pas médiocre et que son courant l'est moins encore

Il ne faut donc pas compter beaucoup sur la navigation dans les eaux des fleuves de l'Arménie, bien que des bateaux d'une certaine portée sillonnent le Cour et l'Araxe au delà de leur jonction. Cependant le Père de l'histoire grecque nous apprend que, de son temps même, les Arméniens tentaient une navigation à demi-barbare, mais ingénieuse sur l'Euphrate: ils embarquaient les produits de leur pays et de l'étranger, surtout certain vin de palmier, dans des barques rondes dont la carène était de saule et le dehors de peau, et qui pouvaient porter jusqu'à 5000 talents [3]. On les abandonnait au courant du fleuve, et on arrivait à Babylone: le retour se faisait par terre. L'explication est simple: on vendait la partie solide des barques, on chargeait les peaux sur des ânes qu'on avait soin d'embarquer en venant, et on s'en retournait au port, qui certes ne ressemblait guère à Marseille. Je ne sais ce que vous en pensez, Messieurs, mais le naïf Hérodote considérait cette navigation comme la plus grande merveille de la Babylonie, après sa capitale



[1] Horace. Odes. II. 9

 

[2] Stace

 

[3] A peu près 130, 000 kilogrammes