Après
un
cours
de
cent
vingt
ans
de
principauté
des
Barons
Roupéniens,
leur
souveraineté
devenant
une
royauté,
apporta
conséquemment
bien
des
changements
dans
le
pays,
dans
les
lois
et
l'administration
de
l'Etat
et
même
dans
les
noms
et
les
charges
des
dignitaires
ou
fonctionnaires
politiques.
De
vieilles
institutions
devaient
se
rétablir,
de
nouvelles
devaient
se
former.
Léon
entouré
de
ministres
dévoués
et
de
quelques
savants,
les
yeux
fixés
toujours
sur
les
Assises
de
Jérusalem,
y
réfléchit
longtemps
et
donna
à
ces
institutions
tout
son
empressement
et
tous
ses
soins.
Voici
ce
qu'écrit
un
historien:
«Lorsque
Léon
entendait
parler
de
quelqu'un
qui
pouvait
lui
être
utile,
il
l'envoyai
aussitôt
chercher,
où
qu'il
se
trouvât,
le
faisait
venir
à
son
palais
et
le
comblait
de
présents
».
Il
agissait
de
la
sorte,
non
seulement
vis-à-vis
de
ses
compatriotes,
mais
encore
vis-à-vis
des
princes
et
des
miliciens
français
qui
vinrent
volontiers
se
mettre
à
sa
disposition
et
furent
ainsi
les
témoins
des
grandes
idées
de
Léon,
de
la
puissance
de
son
génie
et
de
la
gloire
dont
il
rehaussa
son
règne.
Léon
répandait
donc
dans
son
royaume
comme
des
rayons
de
lumière
et
de
vie,
par
les
réformes
qu'il
y
introduisait,
par
les
progrès
qu'il
faisait
accomplir
aux
arts
et
aux
sciences,
par
la
politique
adroite
qu'il
apportait
dans
ses
relations
avec
le
clergé
séculier
et
régulier.
Il
avait
le
puissant
appui
de
tout
le
clergé
et
particulièrement
du
vénérable
vieillard
de
la
dynastie
parthe,
du
Catholicos
Grégoire
Abirad.
Léon
venait
en
aide
à
tous
ses
sujets,
soit
en
personne,
soit
par
ses
ministres.
Son
zèle
protecteur
s'étendit
non
seulement
sur
ses
soixante-dix
barons,
seigneurs
de
Châteaux
forts,
mais
encore
et
peut-être
davantage
«
sur
les
couvents
et
les
lieux
saints
»
au
dire
de
l'
historien.
Il
comprenait
bien
la
grande
utilité
des
maisons
religieuses
et
leur
influence
sur
les
progrès
moraux
d'un
pays.
En
cela,
il
fut
d'ailleurs
soutenu
par
la
piété
de
sa
famille,
et
jamais
l'ambition,
l'amour
des
conquêtes
et
les
autres
passions
du
même
genre
ne
furent
capables
d'ébranler
la
fermeté
de
sa
foi
et
de
troubler
son
zèle
religieux.
L'historien
rapporte
«
qu'il
faisait
célébrer
le
jour
de
Pâques
avec
autant
de
faste,
autant
de
solennité,
autant
de
festins
»
que
nous
avons
vu
qu'il
fit
pour
la
fête
de
l'Epiphanie.
Ce
n'était
pas
pour
le
plaisir
qu'il
y
éprouvait
lui-même,
c'était
plutôt
pour
le
plaisir
que
par
là
il
procurait
aux
autres.
Bien
qu'aucun
des
Chroniqueurs
ne
nous
ait
parlé
distinctement
de
ses
œuvres,
ni
des
nombreux
édifices
qu'il
fit
élever,
il
paraît
cependant
qu'il
s'occupa
tout
d'abord
d'élever
des
forteresses
le
long
de
ses
frontières,
de
fortifier
les
défilés
des
montagnes
et
les
passages
des
fleuves.
Ensuite
il
pensa
à
embellir
les
villes
par
de
nouvelles
constructions
et
surtout
Sis,
sa
capitale,
et
à
rendre
imprenable
le
fameux
fort
de
cette
dernière
cité.
Willebrand,
que
nous
avons
cité
plus
haut,
en
donne
le
témoignage.
Plus
tard
ce
fut
de
Tarse
et
des
autres
villes
qu'il
s'occupa.
Mais
fidèle
à
la
promesse
qu'il
avait
faite
au
Pape,
il
restaura
avec
un
soin
particulier
les
églises,
non
seulement
les
nationales,
mais
celles
aussi
des
Grecs
et
des
Latins.
En
outre,
il
agrandit
les
diocèses
des
Evêques
des
principales
villes.
Le
monastère
sur
lequel
il
porta
ses
préférences,
fut
celui
de
Agnèse.
Il
lui
donna
des
proportions
plus
vastes
et
en
fit
un
monument
remarquable.
C'est
ce
monastère
qu'il
choisit
pour
passer
la
dernière
et
inévitable
heure
de
son
existence.
Le
pays
de
Sissouan
où,
au
milieu
des
indigènes,
habitaient
tant
d'étrangers
grecs,
syriens
et
latins,
devait
être
administré
d'une
façon
plus
en
conformité
avec
les
Assises
de
Jérusalem,
dont
faisaient
usage
toutes
les
principautés
chrétiennes
en
Syrie.
Autrement
des
contestations
et
des
querelles
continuelles
se
seraient
élevées
parmi
cette
population
de
langues
et
de
religions
différentes.
Chaque
nationalité,
du
reste,
s'était
soumise
à
ces
Assises,
l'une
par
consentement,
l'autre
par
habitude.
Les
Arméniens,
de
leur
côté,
s'étaient
conformés
aux
us
et
coutumes
des
Antiochiens;
non
seulement
parce
qu'ils
se
trouvaient
voisins
de
leur
principauté
mais
encore
parce
qu'ils
y
étaient
tenus
par
le
devoir
d'hommage
au
Prince
de
ces
derniers.
Les
Arméniens,
en
revanche,
en
recevaient
l'ordre
chevaleresque.
Sous
le
règne
de
Léon,
les
Assises
d'Antioche
n'étaient
point
encore
fixées
par
l'écriture.
—
Elles
ont
été
retrouvées,
ces
temps-ci,
par
hasard,
à
la
gloire
de
la
littérature
arménienne.
L'original,
en
latin
ou
en
français,
n'a
pas
encore
été
retrouvé.
Nous
en
possédons
la
traduction
arménienne
du
Connétable
Sempad,
faite
au
commencement
de
la
deuxième
moitié
du
XIII
siècle,
dont
la
copie
(que
nous
possédons
personnellement)
a
été
écrite
en
1332,
par
ordre
de
Léon
IV.
—
Cependant
les
Arméniens
les
tenaient
de
la
tradition,
et
les
avaient
fait
passer
dans
leurs
usages,
surtout
pendant
le
règne
de
Léon.
Ceux
qui
voudraient
étudier
ces
lois,
pourront
le
faire
dans
la
traduction
que
nous
en
avons
faite
en
français
et
publiée
en
1873.
Car
ce
serait
trop
long
et
peu
nécessaire
de
les
citer
toutes
ici.
Nous
dirons
seulement
qu'avant
Léon,
ses
prédécesseurs
dominaient
plutôt
par
la
force
que
par
le
droit.
Aussi
celui
d'entre
les
seigneurs
des
Châteaux-forts,
qui
pouvait
compter
sur
ses
propres
forces
ou
sur
l'aide
de
l'Empereur
des
Grecs,
se
croyait-il
libre
de
toute
soumission
au
Baron
de
l'Arménie.
Léon,
devenu
roi,
assujettit
tous
ces
Seigneurs
à
la
fois.
Il
fut
reconnu
souverain
de
toute
la
Cilicie
et
de
l'Isaurie
et
de
toutes
les
provinces
qui
se
réunirent
sous
sa
domination.
Toutefois,
il
n'était
pas
le
maître
absolu
du
pays
qui,
depuis
des
siècles,
était
divisé
en
tant
de
parties
et
que
dominaient
tant
de
maîtres
ou,
pour
mieux
dire,
tant
de
seigneurs
de
châteaux-forts.
Sous
le
règne
de
Léon
Sissouan
n'était
qu'une
région
aristocratique;
chaque
seigneur
avait
son
degré
plus
ou
moins
élevé
de
noblesse,
selon
l'ancienne
coutume,
il
avait
le
titre
de
prince
et
avec
le
régime
nouveau,
il
eut
le
titre
de
Baron.
Ces
Barons
devaient
au
Roi,
la
vassalité,
qui
consistait
à
le
reconnaître
comme
le
suprême
souverain
du
pays.
Ils
devaient
recevoir
de
lui
la
confirmation
de
succession;
ils
lui
fournissaient
des
troupes
en
temps
de
guerre,
et
devaient
se
rendre
sur
son
invitation
à
la
Haute-Cour
qui
réglait
les
affaires
importantes
du
Royaume.
Ce
n'étaient
pas
les
hommes
seuls
qui
se
trouvaient
soumis
aux
lois
de
vasselage,
les
femmes
l'étaient
aussi.
Elles
n'étaient
exemptes
que
de
faire
partie
de
la
milice.
Elles
portaient
le
titre
de
Baronnes.
Ceux
qui
étaient
tenus
au
devoir
d'hommage
et
au
service
du
Roi,
étaient
ceux
qui
en
avaient
reçu
des
terres
et
des
charges.
Si
ceux-ci
commettaient
une
faute,
le
Roi
pouvait
leur
confisquer
ce
qu'ils
avaient
reçu
de
lui,
chose
qu'il
ne
pouvait
faire
aux
Barons
de
son
propre
chef,
mais
seulement
par
un
jugement
de
la
Haute-Cour;
lorsque
ces
Barons
mouraient
sans
laisser
de
successeurs,
leurs
possessions
passaient
au
Roi.
La
plus
grande
partie
du
pays
et
les
plus
célèbres
forteresses
lui
appartenaient;
ces
propriétés
s'accrurent
sans
cesse
en
raison
de
l'extinction
des
familles
ou
par
le
relâchement
des
lois.
C'est
ainsi
que
le
domaine
royal
s'augmenta
de
jour
en
jour;
il
s'augmenta
aussi
quelquefois
par
la
force
tyrannique.
Sous
le
règne
de
Léon,
—
ce
que
nous
avons
dit,
du
reste,
à
plusieurs
reprises,
—
on
comptait
dans
le
royaume
soixante-dix
forteresses
et
Seigneurs
vassaux,
qu'on
appelait
encore,
«
Fideles
Hommes
».
La
moitié
d'entre
eux
était
formée
de
Grecs,
de
Latins
et
d'Allemands,
et
les
trois
ordres
de
Chevaliers,
dont
nous
parlerons
plus
tard,
qui
avaient
reçu
des
propriétés
dans
le
pays
avant
ou
pendant
le
temps
de
Léon
et
étaient
eux-mêmes
soumis
aux
lois
de
vasselage.
Beaucoup
de
ces
Barons
vassaux
n'avaient
d'autres
fonctions
à
remplir
que
celles
de
membre
de
la
Haute-Cour.
Il
y
avait
aussi
d'autres
qui
étaient
préposés
aux
charges
importantes
du
pays,
et
par
conséquent
au-dessus
des
premiers
en
dignités.
A
part
ces
familles
nobles,
le
peuple
était
sujet
du
Roi
ou
des
Barons
dont
il
dépendait.
Personne
du
peuple
n'avait
droit
de
sièger
à
la
Haute-Cour
que
lorsqu'il
était
élevé
à
la
noblesse
ou
pourvu
d'une
charge.
Les
intérêts
et
les
questions
de
politique
du
peuple
étaient
réglés
par
la
Cour-Basse,
dont
les
membres
étaient
choisis
dans
le
peuple
et
appelés,
Bourgeois.
Je
suppose
que
ce
sont
ces
personnages
que
l'historien
royal
désigne
quelquefois
sous
le
nom
de
Petits-hommes.
Les
agriculteurs
et
les
habitants
des
campagnes
qui
étaient
la
propriété
des
Barons,
s'appelaient
Paricus,
du
grec
Πάροιχοι.
Enfin
celui
qui
ne
relevait
d'aucun,
soit
parce
qu'il
n'était
pas
sous
la
puissance
d'un
maître,
soit
parce
qu'il
n'avait
aucune
possession
dans
son
domaine,
s'appelait
non-vassal.