Sisouan ou lArméno-Cilicie

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  La configuration du sol divise la Cilicie en deux parties bien distinctes. Depuis des temps immémoriaux, ces deux parties sont connues sous les noms de Cilicie de plaine et Cilicie pierreuse. La première se trouve au sud-est du territoire cilicien; la seconde, formée par la vallée du fleuve Calycadnus ou de Séleucie, comprend la région occidentale. Le terrain de cette dernière n'est pas si élevé que la partie montagneuse septentrionale. Apre et escarpée au centre, elle est appelée pour ce motif Τραχε ̃ ια ou Τραχε ̃ ιωτις par les Grecs et Cilicia Trachia par les Latins. Le pays est coupé de plusieurs montagnes et collines isolées; on y rencontre aussi une chaîne de montagnes, distante de vingt kilomètres de la mer et s'étendant vers la plaine sur une longueur égale. Elle se dirige du nord-ouest au sud-est, passe devant Coracesium et va jusqu'au promontoire d'Anamour, appelé Imbarus par les anciens. Selon eux, près de la mer, s'élève la colline pierreuse de Krag ( Κράγος ) et, en face, entre Sélenti, et Karatros, l' Antikrag ( ' Αντιχραγος ). Quant à l' Andricus mons des anciens, il faudrait le chercher sur le côté oriental de l'Imbarus. Près de ce promontoire également, mais dans la région nord-est, se trouve l' Arimactus et d'autres montagnes sans célébrité. Ces sommités couvrent le pays jusqu'au fleuve de Séleucie. C'est sur la rive orientale de ce fleuve que s'élève la fameuse montagne d' Arîmes, si fertile en légendes, montagne dont nous parlerons dans notre Topographie. Vers l'Orient, jusqu'aux frontières de la province de Tarsous, se trouvent çà et quelques hauteurs qui vont insensiblement mourir à la plaine. Mais les plus hautes et les plus fertiles montagnes de la Cilicie, sont celles du Taurus. D'un aspect imposant, elles couronnent la frontière septentrionale du pays et même une partie de la frontière orientale. En effet, cette longue chaîne de montagnes qui naît aux environs de la région de Lycie, va du sud-ouest au nord-est, sépare la Phrygie de la Pamphylie, traverse cette dernière région, passe par l'Isaurie et forme une limite naturelle entre la Cilicie et la Cappadoce [1]. On trouve encore dans la Petite Arménie, un long bras de montagnes: l' Antitaurus, qui s'étend du nord-est presque jusqu'aux confins de Pontus, et un rameau plus court qui s'en détache sans interruption et se dirige vers l'est du golfe arménien; c'est le célèbre Amanus, situé entre la Cilicie orientale et la Syrie. Mais ce ne sont que des ramifications du Taurus; le tronc principal de cette chaîne se dirige vers l'orient et divise la province du Djihan de celle de la Troisième Arménie. Il est coupé par le fleuve de l'Euphrate, parcourt la Quatrième Arménie (dans la Grande Arménie), traverse les contrées voisines de Aghtzenik, Cordjayk et Mogk, va jusqu'à Vaspouragan, aux limites orientales de l'Arménie, il perd son nom de Taurus.

Non seulement dans ces régions éloignées, mais encore dans notre pays, on trouve des espaces plats. Bien que la plupart des sommités de ce massif colossal se dressent à pic, escarpées, sans présenter de plateaux comme les Alpes ou le Caucase, on y trouve cependant des gorges d'où coulent des rivières qui se perdent dans le Sarus, le Pyramus et le Djihan. Ces espaces libres offrent un chemin à ceux qui voudraient passer dans l'Asie occidentale du côté de la Syrie ou de l'orient: ce sont les gorges et les célèbres Portes de la Cilicie, de l'Arménie et de la Syrie. Nous en reparlerons sous peu.

Autrefois on ne donnait qu'un seul nom, à tout ce massif, long de 200 kilomètres; mais aujourd'hui, on divise le Taurus en trois branches qui portent chacune un nom particulier. Nous avons d'abord la chaîne des Monts Bulgares, la plus vaste des trois; elle forme la partie occidentale du massif et est comprise entre Laranda et Héraclée, au nord, et le reste du Taurus au sud. On les a ainsi appelés à cause des Bulgares exilés dans ces régions par les empereurs de Byzance. Viennent ensuite, au sud-ouest des précédents, les monts Dumbélék, (Tambourin), dont les principales sommités sont au-dessus de 7000 pieds, tels que Gouglouk, Soumak, etc; jusqu'à la vallée de Séleucie. Enfin, la troisième partie comprend les monts Allah ou Ala, entre Tiana et Nigdée à l'ouest, et le fleuve Sarus à l'est; le point culminant de cette branche est l' Apisch-kar. Les Monts Bulgares, sont les plus hauts de tous; ils surpassent de 2000 pieds les sommités les plus élevées des autres branches. Leur aspect est formidable: ce sont d'immenses rochers, massifs et nus, on n'y voit aucun pâturage, aucune végétation. A l'est se trouvent les cimes du Kochan, 9400 pieds de haut; un peu plus vers l'ouest, près du mont Ghêïk-tépé (Sommet du Cerf, hauteur 10, 000 pieds) on rencontre de larges passages qui conduisent à Héraclée. Beaucoup de ces rochers et de ces sommités ont des noms particuliers, tels que les monts Karga (9000 pieds) ainsi appelés à cause des nombreux nids de corneilles que l'on y rencontre. La plus haute cime du Taurus est celle du Meddessize (11, 000 pieds). Cette montagne s'élève comme une immense pyramide; sur son versant septentrional, à 2000 pieds environ du sommet, elle forme comme une muraille. Elle peut être regardée comme le type des montagnes de la Cilicie: toutes uniformément nues et escarpées, elles portent souvent à leurs sommets de vastes champs de neige. A 9000 pieds, la neige reste jusqu'aux mois de juillet et d'août; à la hauteur moyenne de 6000 pieds on voit déjà apparaître un commencement de végétation. D'abord ce n'est que dans les creux et dans les endroits ne se rencontre pas le rocher. Plus on descend, plus la végétation devient luxuriante et cela d'une façon très sensible. Dans la zone comprise entre 6000 et 3000 pieds, on rencontre ordinairement des forêts, cependant l'orge mûrit jusqu'à 5500 pieds. Si nous partons de l'ouest nous rencontrons la région comprise entre 3500 et 6000 pieds, entièrement recouverte de forêts. Cette montagne établit le partage des eaux de la région du Cydnus. A une altitude de 8200 pieds se trouve l'étroit passage appelé Kara-kapou (Porte noire). Immédiatement après cette première sommité, nous avons le Utch-tépé, dont le point culminant se trouve à 10, 000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Cette montagne est au sud du Meddessize, auquel elle touche par son extrémité inférieure. Sur le versant de cette montagne à une altitude de 8600 pieds, on remarque un riche pâturage, dont la forme rappelle une selle; c'est le Kétchi-béli (Flanc de chèvre).

Ensuite le Kar-gölu (Lac de neige), ainsi appelé à cause des petits lacs que l'on rencontre vers son sommet (h. 8800 pieds); le Bache-Olouk, 8200 p., en forme de pyramide; le Dévé-tépé (7100-6500) montagne verdoyante, à l'ouest du vallon des mines de plomb; et au sud, le coteau d'Inék-tépé. La troisième sommité se trouve entre le fleuve Aghadjekisse et un autre affluent, qui porte d'abord le nom de Ménévché-sou et dont la source est à 8200 pieds. Entre cette dernière rivière et le mont Kétchi-béli, s'élève le Bouze-kaya (Rocher glacial), 8300 pieds. Les flancs de cette montagne sont couverts de neiges éternelles. C'est que se trouve le chemin qui conduit aux mines de plomb, appelées Ghulek-maghara. Le chemin passe près du lac Tchidem-gueuli, (7300 pieds); on aperçoit de , dans le fond, une éminence verdoyante, haute de 5500 pieds, c'est l' Erdjéghédik. Entre ce lac et son affluent, la rivière Gousgouta, on remarque plusieurs autres cimes: le Délik-kaya (Rocher troué), (9500 pieds), montagne très escarpée, le Tach-olouk (8100 p. ) rocher isolé, en forme de pyramide; le Tchayer-ghédik, (8450 pieds); c'est que l'on trouve à une altitude de 6250 pieds le col de Karli-boghaze. Au sud des Monts du vent, entre le Gousgouta et le Sarus, se trouve un cinquième groupe de sommets, moins élevés que les précédents et n'offrant aucune éminence remarquable. On peut en parcourir toute la série et redescendre jusqu'à la plaine en douze heures; le trajet direct ne dure que cinq heures.

C'est au milieu de ces montagnes que se trouvent les célèbres Portes de la Cilicie, appelées par les Arméniens Gaban de Gouglag. On pourrait, selon nos ancêtres, et parmi eux Nersès de Lambroun, les appeler les Trônes de la Cilicie. On y voit encore de nos jours des traces de forteresses, d'anciens châteaux et de tours, et plusieurs de ces ruines sont assez remarquables. Le grand nombre de montagnes et de vallons qui couvrent le pays, donnent à ces lieux l'aspect d'un labyrinthe. Il ne faudrait pas pour en sortir chercher un chemin du côté de la Grande Porte (de la Cilicie), mais de divers autres côtés. Les Turcs donnent à ces passages une infinité de noms, tantôt ils les appellent portes, détroits, gorges, tantôt cols, tuyaux ou défilés. Les plus connus de ces passages sont le Kara-kapou, au sud-ouest du chemin qui conduit à Dantzoud (Tensyt), et au château de Gantzé, le Tache-olouk et le Karli-boghaze, et plus loin, le Tchayer-ghédik, l'Erdjé-ghédik entre la grande forteresse et les mines de plomb de Ghulek. Plus loin encore dans la vallée de Gousgouta, nous avons l'Elmali-olouk, puis Tchathal-olouk aux environs de Gouglag; Déghirmen-boghazi et Keupru-dérbénde, dans la vallée de Kerk-ghétchide, et d'autres encore qui ne peuvent donner passage libre qu'aux piétons ou aux troupeaux de moutons.

Entre les Monts Bulgares et Dumbélek, nous trouvons le défilé de Kara-Kesmèze, qui conduit par le ravin de Pambouk (coton) à la plaine de Tarsous. De l'autre côté, c'est à dire à l'ouest, on trouve aussi de nombreux passages. Un des plus connus est celui qu'un de nos historiens appelle Col des Eglises (Eghéghetziatz-poghe). Le même auteur cite encore le Col de Podande, Ποδανδοσ passage à 18 ou 20 kilomètres au nord du grand Col de Gouglag d'où ils conduisent vers le sud. En avançant vers l'ouest, suivant le cours da la rivière Tchaked, affluent du Sarus, ce col traverse les monts Taurus et aboutit près d'Iconie.

Le premier de nos historiens qui le cite, Sébius appelle « Défilé de l'entrée de la Cilicie », ce que les Grecs et les Romains appelaient Portes de la Cilicie ou du Taurus. D'autres leur donnent différents noms selon leur forme et leur grandeur. C'est ainsi que les orientaux appellent cols les passages les plus étroits et les plus courts, comme ceux d'Eghéghetziatz et de Molévon [2] , et conduits, les plus longs, comme ceux que notre historien royal cite près de Manion et près de Laranda. L'historien arabe, Macrizie [3] , se sert du mot détroit derbende; il parle du détroit de Sis et d'un autre passage qu'il appelle Détroit des Romains, et qui semble être le col de Podande ou un autre col situé à l'ouest de ce dernier. Ce serait alors celui que les voyageurs récents nomment le Carga-ghetchmèze (Impasse aux corneilles) et qui se trouve au pied des monts Bulgares, vers Héraclée.

Tous ces cols et passages viennent se rencontrer dans les hauteurs de la Cilicie, ils sillonnent le pays à l'ouest et au nord. Il ne faudrait pas les confondre avec les passages remarquables qui aboutissent aux principales Portes de la Cilicie et de la Syrie, à l'est, dans d'autres montagnes.


[1]          Le géographe Abulféda appelle les susdites montagnes de la côte, Djébel-el Tarakimyne, c'est-à-dire, Monts des Turcomans de Karamanie.

[2]          Ce nom est cité dans la Chronique de notre Samuel d'Ani.

[3]          Makrizie, Traduction française, I, II. 60-65.