Comme
nous
ne
possédons
point
les
mémoires
des
contemporains
sur
les
édifices
de
Sis,
nous
empruntons
ici
une
page
de
la
«
Nouvelle
Arménie
»
du
P.
Indjidjian,
publiée
il
y
a
quatre-vingt-dix
ans:
il
y
raconte
ce
qu'il
a
entendu
par
des
témoins
oculaires
et
des
vieillards:
«L'ancien
palais
des
rois
roupiniens,
ou
comme
on
l'appelle,
le
Tarbas,
est
un
édifice
circulaire,
construit
avec
de
grosses
pierres
de
taille,
ayant
chacune
une
grandeur
de
trois
ou
quatre
toises,
cimentées
ensemble
avec
du
plomb.
L'édifice
a
trois
portes,
au
nord,
à
l'ouest
et
au
sud;
le
côté
de
l'est
est
pourvu
de
trois
grandes
fenêtres,
dont
la
moyenne
est
ronde:
sur
chaque
porte
on
voit
des
sculptures
et
des
ornements
en
basrelief
exécutés
avec
art.
On
peut
monter
par
une
des
portes
sur
la
terrace
du
palais,
laquelle
par
sa
grande
hauteur
domine
sur
tous
les
alentours.
Maintenant
toutes
ces
constructions
sont
délaissées,
et
les
Sarrasins
emportent
le
plomb
pour
leurs
besoins;
ils
transporteraient
même
les
pierres
si
c'était
possible.
A
l'ouest
du
palais
on
voit
renversées
sur
le
sol
trois
ou
quatre
colonnes
de
marbre
noir.
A
un
jet
de
pierre,
jaillissent
deux
sources,
dont
l'eau
douce
de
la
première
est
amenée
dans
le
palais
par
une
conduite
souterraine;
l'eau
de
la
seconde
est
amère.
La
prison
se
trouve
dans
l'enceinte
des
murailles,
mais
séparée
des
autres
constructions.
On
y
voit
une
grande
caverne
taillée
dans
le
roc,
près
du
ruisseau
Asmentzoug;
elle
peut
contenir
presque
2000
personnes;
les
habitants
l'appellent
Guverdjinlik
(colombier),
parce
que
d'innombrables
colombes
sauvages
y
ont
fait
leur
nid.
Devant
la
caverne
il
y
a
une
muraille
épaisse
avec
une
petite
porte,
qui
seule
donne
accès
à
la
caverne;
et
devant
la
porte
s'étend
un
espace
plat,
où
plusieurs
trous
laissent
pénétrer
la
lumière
dans
les
souterrains.
On
dit
que
ce
fût
la
prison
primitive
de
Sis
ou,
plus
vraisemblablement,
la
cachette
des
trésors,
mentionnée
par
Vartan».
Les
annales
de
Sis,
au
XVII
e
siècle,
donnent
diverses
significations
au
mot
Tarbas;
d'abord
ils
lui
attribuent
la
signification
de
cathédrale,
comme
on
le
voit
dans
le
passage
suivant:
«Léon
bâtit
à
Sis
une
grande,
magnifique
et
célèbre
cathédrale
en
voûte...
et
maintenant
quelques
Sissiens
l'appellent
Tarbas».
On
donnait
encore
le
nom
de
Tarbas
à
un
donjon
qui
dominait
les
alentours,
et
regardait
vers
l'est;
ainsi
la
chronique
dit:
«Léon
construisit
une
maison
pour
sa
résidence,
qui
est
à
présent
en
ruine:
elle
a
des
fenêtres
et
s'appelle
Tarbas,
et
regarde
l'est».
De
nos
jours
on
ne
trouve
du
palais
royal
que
quelques
débris;
la
partie
circulaire
est
disparue;
il
ne
reste
que
la
partie
carrée
des
murailles
où
l'on
a
construit
dernièrement
une
maison
pour
la
résidence
du
Catholicos,
en
se
servant
en
partie
des
pierres
de
la
construction
ancienne.
La
forteresse
célèbre
est
assise
sur
un
rocher,
au
sommet
duquel
on
arrive,
après
une
heure
de
marche
pénible:
elle
est
maintenant
abandonnée
et
déserte,
pourtant
elle
est
encore
debout
en
grande
partie.
En
raison
de
la
forme
du
rocher,
les
murailles
sont
irrégulières,
elles
sont
flanquées
de
tours
et
de
bastions.
Elle
se
trouve
divisée
en
trois
parties,
assises
sur
les
trois
principaux
sommets
du
rocher,
mais
liées
entre
elles
par
des
remparts.
Du
côté
sud
se
trouvait
le
vrai
château
ou
le
donjon;
sur
l'une
des
parois
intérieures
de
la
salle
on
voit
une
inscription
mutilée:
Dans
l'ère
des
Arméniens...
du
roi
Héthoum...
A
côté
du
donjon
se
trouve
un
escalier
donnant
accès
à
une
citerne,
où
se
recueille
l'eau
de
pluie,
et
à
quelques
pas
de
là
est
la
porte
qui
conduit
à
des
lieux
souterrains.
Sur
le
deuxième
sommet
on
remarque
les
ruines
d'une
chapelle;
et
sur
le
troisième,
un
petit
réservoir
d'une
eau
excellente
qui
reste
intarissable;
on
lui
attribue
la
vertu
de
guérir
beau
coup
de
maladies.
Cette
forteresse
était
tellement
estimée
par
les
rois
d'Arménie
à
cause
de
sa
position,
qu'un
des
derniers
rois
(Constantin
II)
en
avait
fait
graver
l'image
sur
sa
monnaie
d'or,
avec
cette
devise
[1]:
[1]
Le
roi
Constantin
I
er,
fils
de
Léon
II,
régna
peu
de
temps;
le
dernier
Constantin
vécut
alors
que
la
domination
des
Arméniens
marchait
vers
sa
ruine.
Il
est
donc
probable
que
Constantin
II,
fils
du
maréchal
Baudouin
(1345-65),
fit
battre
cette
monnaie
dans
le
but
de
mieux
faire
voir
son
mépris
pour
ceux
qui
le
considéraient
comme
un
tyran;
il
aura
voulu
leur
montrer
que
le
vrai
roi
et
le
boulevard
du
royaume
c'était
le
château
de
Sis,
et
qu'ils
devaient
respecter,
plus
que
sa
personne
même.